Voilà un petit moment déjà que j’ai assisté à la projection du dernier film de Ken Loach, un cinéaste engagé qui continue d’explorer ses thèmes de prédilection, faisant part de son engagement politique dans diverses problématiques sociales.
Il a reçu, à juste titre la Palme d’Or à Cannes. Le film « I am Daniel Blake » m’a absolument bouleversée, à tel point qu’il m’a fallu un certain temps avant de pouvoir en écrire quelque chose.
En fait, au fond de moi, je me dis, quoi écrire de plus, que ce que j’ai vu sur cet écran.
Dans ce film tout est dit et je crois qu’il m’a profondément émue car j’ai toujours été touchée par la pauvreté des autres, la solitude de certains, la désespérance, je sais ce que cela signifie compte tenu de mon parcours de vie mais aussi de par mon parcours professionnel qui m’a conduite à accompagner des familles et enfants défavorisés pendant 30 ans.
Mais j’ai été également choquée et honteuse de voir que certaines personnes s’engagent dans le service public sans même savoir ce que cela implique.
Service public signifie servir, protéger, informer, aider. Les fonctionnaires d’état sont payés pour accompagner chaque citoyen dans ses démarches et donner à chacun les moyens de trouver des solutions.
Ils se doivent d’être respectueux, patients, gentils.
Ceux sont des accompagnants et ceux ne sont pas des bénévoles donc la moindre des choses c’est de faire ce pour quoi ils sont payés consciencieusement, avec patience et gentillesse.
Les fonctionnaires signent un contrat de travail de 42 ans qui leur donnent un privilège c’est de ne pas perdre leur emploi et de ne jamais s’angoisser sur la pérennité de cet emploi, ils savent que tous les 29 de chaque mois leur traitement va tomber!.
Ils sont donc payés pour exercer une mission, et une mission capitale pour chaque citoyen alors qu’il la fasse et gentiment et sans humilier la personne qui a déjà beaucoup de mal à se présenter au guichet pour expliquer son problème.
Les conditions de vie de certaines personnes sont encore plus terribles en Angleterre et les services « de l’état » encore plus bornés et disciplinés qu’en France (on se croirait dans les 12 Travaux d’Astérix) Obtenir le laissez-passer A-38 dans la maison qui rend fou. Ce passage semble être une mise en scène parodique du système administratif français, réputé pour son extrême complexité.
Mais cette fois l’histoire est vraie et on pleure, on ne rit pas et on sort de la salle en ayant honte!
Enfin moi j’ai eu honte d’être fonctionnaire d’état, alors que j’ai toujours mis toute mon énergie et mes compétences au service des familles démunies.
En tout cas, voilà ce que j’ai ressenti et ce film m’a encore donné davantage envie d’aider autrui et de faire du bénévolat, de donner de mon temps, au moins ça, car je suis loin d’être riche mais une main tendue et un sourire cela fait déjà beaucoup de bien quand on est désespéré et seul.
Quand on a presque perdu le respect de soi-même, quand on a honte de faire partie d’une humanité qui nous rejette, un sourire, un bonjour, cela peut nous remettre parfois sur nos pieds!
Vous devez retenir une chose c’est qu’être riche ce n’est pas posséder des choses et de l’argent, être riche c’est de donner, donner de l’amour et de l’attention aux autres. Cet acte d’amour vous grandit et vous rend heureux, je vous l’assure.
L’histoire:
Pour la première fois de sa vie, Daniel Blake joué, merveilleusement par Dave Johns, un menuisier anglais de 59 ans, est contraint de faire appel à l’aide sociale à la suite de problèmes cardiaques. Mais bien que son médecin lui ait interdit de travailler, il se voit signifier l’obligation d’une recherche d’emploi sous peine de sanction.
Au cours de ses rendez-vous réguliers à l’agence pour l’emploi, Daniel va croiser la route de Katie, ce rôle est interprété par Hayley Squires, bouleversante en mère célibataire qui se sacrifie pour ses deux enfants et qui a été contrainte d’accepter un logement à 450km de sa ville natale pour ne pas être placée en foyer d’accueil. Pris tous deux dans les filets des aberrations administratives de la Grande-Bretagne d’aujourd’hui, Daniel et Katie vont tenter de s’entraider…
Une histoire de tous les jours, car des personnes en galères il y en a des tas, assises sagement sur les bancs de l’ANPE, ou à la CAF, ou dans les bureaux de la MDPH, leur ticket de passage à la main…et parfois, malgré une arrivée matinale, muni du fameux billet numéroté par rang de passage, le sacro-saint laisser-passer obligatoire pour s’exprimer au fonctionnaire planqué derrière son hygiaphone! Et bien parfois, plutôt souvent, on est obligé de refaire la même démarche le lendemain parce qu’on n’a pu être reçu!
L’Angleterre est un exemple encore plus parlant de ce qui se passe ici en France, Ken Loach a brillamment démontré combien les rouages d’une administration idiote, bornée et inhumaine peuvent fracasser une vie humaine et provoquer l’humiliation et la honte.
Si comme moi vous êtes révoltés par l’individualisme ambiant, si comme moi, vous vous tournez vers les autres, pour tenter toujours de rendre service, aider du mieux que vous pouvez alors vous comprendrez ce que j’ai ressenti.
Le film est transparent, efficace, le coup est donné sans bavures, on sort de la salle assommé, abasourdi et honteux.
Il m’a fallu bien 10 minutes avant de pouvoir me lever de mon siège tellement j’étais bouleversée.
J’adresse tout mon respect, mon admiration à un scénariste qui n’a pris aucune pincette pour nous montrer les aberrations de la bureaucratie administrative, pour nous montrer que nous avons tous une part de responsabilité.
Que doit-on tirer de ce film ? Tout simplement qu’il faut cesser de penser à soi, de ne penser qu’a notre petit microcosme personnel qui tourne toujours autour de l’argent, l’argent ne sert à rien si on a pas de coeur, apprenez à donner, à aider, vous verrez combien cela rend heureux et riche.
Le jeu des acteurs est authentique, touchant, bouleversant et je salue leurs talents.
Une palme d’or vraiment méritée, merci à Ken Loach, ce film a été pour moi le plus marquant de cette fin d’année 2016.
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